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Le Locataire de Roman Polanski - 1976

Le Locataire de Roman Polanski - 1976

Le mal est collectif, le voisinage est malveillant, accusateur, rentre dans l'appartement comme dans la tête, encore, avec Polanski. Mais cette fois le paranoïaque semble vraiment n'être qu'un paranoïaque. Les petits soucis du quotidien, c'est bien dans les détails que le diable se cache. Notre héros, citoyen français vivant dans un Paris anglophone et kitchissime, peine à faire valoir ses droits et son identité, alors il sera le locataire aux talons hauts, aux ongles vernis mais aux élans suicidaires. Roman s'y prendra à deux fois pour clouer son désaxé au pilori.

Que d'angoisses, que de visions cauchemardesques. D'abord nocturnes, ces hallucinations s'emparent de ses jours, de ses petits-déjeuners au bistrot du coin, de ses courses contre la montre dans les rues de la capitale. Il fumait des gitanes, il commençait la journée avec un chocolat chaud. Vraiment? Poussé par la volonté des autres, dorénavant il aimera les Marlboro et les cafés serrés.

Si l'enfer avait des couleurs et des personnages, ça ressemblerait certainement à ça. A ce dernier quart d'heure, à ces illusions de malice collective, orgie dans le malheur d'une victime désignée. Le sacrifice volontaire après une vaine tentative de résister. Notre malheureux personnage doit faire moins de bruit, doit signer plus de pétitions. En gros, il doit disparaître.

L'altérité ultime : être une femme, être la locataire d'avant. Attraction pour les signes extérieurs de richesse féminine. La voix, l'intonation, les manières, "where in the world did you find these shoes? gorgeous! I think I'm pregnant." Un peu d'humour dans ce monde de furie trop bien partagée. Et puis il atteint ce point de non-retour jusqu'à conclure le cercle narratif : était-il cette historienne suicidaire? qui sont véritablement ses voisins?

Il a juste besoin d'être materné dans de jolis draps roses par la jolie Isabelle Adjani. Comment survivre dans un monde qui ne veut pas de vous et encore moins vous entendre? Les traumas d'un petit garçon, trop faible dans une laideur écrasante qui veut sa mort. Il est seul, sans solution de repli. L'agneau contre la meute de loup. Les scènes de curiosité malsaine après un accident, la foule qui s'agglutine autour du blessé. Chacun y va de son petit commentaire.

Roman Polanski confirme qu'il est un immense acteur et le plus grand serviteur des causes sado-masochistes. Oui, pourquoi persiste-t-il à ne pas jouir de sa liberté, pourquoi reste-t-il dans cet immeuble? pourquoi se convertit-il aux Marlboro? Une histoire du consentement à la douleur infligée par d'autres, une histoire de la soumission qui enclenche la pente scénaristique.

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