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The Double de Richard Ayoade - 2013

The Double de Richard Ayoade - 2013

Richard Ayoade a certes de bonnes références mais il ne craint pas de se vautrer dans le plagiat. Dans sa tambouille bobo, il s'agrippe comme un enfant à son doudou-totem sans tabou aux décors étouffants du Brazil de Terry Gilliam et à la caméra subjective aux visions angoissantes du double cher au Locataire de Polanski. Le cinéphile à la psychologie de comptoir fouille aussi dans la fantasmagorie cauchemardesque de Lynch et la lumière virginale de Kaurismaki. Bref! On pense à beaucoup de grands cinéastes sauf à Ayoade lui-même. Il peut pourtant se féliciter d'avoir lu Dostoïevski. Pourquoi ne pas en faire une adaptation creuse pour montrer à tout le monde qu'il a vu beaucoup de films?

Jesse Eisenberg joue mollement, comme à son habitude, un employé de bureau invisible, que tout le monde ignore et dont personne n'a retenu le nom. Ce gratte-papier brillant pond des rapports pour les autres, sans jamais en tirer la moindre reconnaissance ni la moindre récompense. Depuis sept ans, le pantin de bois essuie le mépris de tous ses collègues et doit systématiquement signer le registre des visiteurs à l'entrée. De toutes façons, dans une société gouvernée par le Colonel, l'individu compte peu. Honni soit celui qui se croit unique. Dans ce jeu de rôles où les êtres sont interchangeables, le conformisme règne jusqu'à faire son nid dans l'approche formelle du récit de Ayoade. Patatra! Simon James, le fantôme de la bureaucratie réifiante et voyeur à ses heures perdues, va devoir faire face à un nouveau collègue. Son parfait sosie, James Simon, est pourtant son parfait opposé. Eloquent, séduisant, au débit plus rapide et plein d'assurance, il est le miroir déformant d'un Simon qui n'ose même pas aborder Hannah, la fille de la photocopieuse dont il est tombé éperduement amoureux. Forcément, il faut que cette jeune femme, sous les traits de Mia Wasikowska, soit hors du temps, hors de cette dictature, par sa fraîcheur solaire comme si elle n'appartenait pas à ce lieu. Dans un monde abreuvé de technologies grises et vieillissantes qui a fini par s'emparer de tous les êtres, un peu de crédibilité dans ce personnage féminin eut été appréciable. Mais il est tellement plus conventionnel d'écrire des rôles de femme-objet, de déesse évanescente idéaliste et idéalisée. Mais c'est bien autour de cette figure inaccessible toujours en robe blanche que va se cristalliser la lutte à mort entre l'homme atone et la bête hypnotique.

Cette confrontation aux deux personnalités pour un même visage n'est jamais que la copie non conforme de ce qui a déja été fait avant. Enfin, étrange morale que de défendre une loi du Tallion morbide où la violence conquérante renvoie à l'inutilité des gens discrets et effacés. Peut-être bercé trop près du rêve américain quand il était petit, le cinéaste britannique qu'on a connu plus décalé dans the IT Crowd, signe là le manifeste pour un Surhomme qui prend son destin en main en supprimant l'inquiétant alter ego. Tout ça pour quoi? Pour prétendre faire un thriller expérimental? Polanski parlait de paranoïa, de la peur viscérale qui habitait le cinéaste. Ayoade nous parle travelling et zoom. Dans une lecture purement performative, sans discours, de Dostoievski, Ayoade perd ses spectateurs à la première minute. Il y a bien cette scène au restaurant, où les chorégraphies des sons et des gestes nous laissent espérer une seconde partie surprenante et audacieuse. Mais le plaisir n'est que de courte durée.

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