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Contes italiens de Paolo et Vittorio Taviani - 2015

Contes italiens de Paolo et Vittorio Taviani - 2015
Contes italiens de Paolo et Vittorio Taviani - 2015
Contes italiens de Paolo et Vittorio Taviani - 2015

Florence, ma Peste, mon Amour!

Les frères Taviani revisitent le Decameron de Boccace quarante ans après Pier Paolo Pasolini. Mais contrairement au réalisateur de Salo ou les 120 jours de Sodome, ils reprennent les cinq histoires les plus sages et certainement les moins controversées pour un film qui avait si bien commencé.

En l'an 1300 et des brouettes, dix jeunes gens fuient la peste qui sévit à Florence pour trouver refuge dans une maison de campagne. Ils vont y ouvrir une parenthèse enchantée non pas 1001 mais 10 nuits, laissant le temps à chacun de raconter une histoire pour ne pas sombrer dans l'ennui. Le schéma narratif sert alors de prétexte à la grande tradition du film à sketch italien. Loin des comédies de Dino Risi, il n'en reste pas moins que les deux octogénaires savent encore nous faire rire et réinventer la direction d'acteur. Et quels acteurs! Riccardo Scarmacio, Kim Rossi-Stuart et Jasmine Trinca entre autres. Malheureusement, on peut aussi regretter ce casting trop parfait où toutes les femmes sont toutes plus bellissima les unes que les autres, les hommes plus ténébreux les uns que les autres. Les contes tournent alors à l'onirisme pur et ne laissent aucune place à l'hypertexte, à une projection dans notre monde où pourtant d'autres formes de pestes se propagent.

En 2013, ils nous avaient foudroyés avec "César doit mourir", des détenus interprétant le Jules César de Shakespeare. Cette forme de théâtre naturaliste et politique a fait ses preuves mais fonctionne en demi-teinte avec Contes Italiens. Au plus près de la peau, les mains sont souvent aussi expressives que les visages. Décidément, les Taviani n'en finissent pas, bien malgré eux, d'évoquer leurs pairs. On ne peut s'empêcher de penser à "Mort à Venise" où Visconti, lui aussi, lui le premier, ne filme la peste que pour mieux révéler la sensualité qui se dégage de l'irradiante jeunesse, d'autant plus frappante qu'on est soi-même au crépuscule de la vie.

Contes italiens de Paolo et Vittorio Taviani - 2015

Chaque geste, chaque hésitation, chaque baiser révèlent des préoccupations bien plus incommunicables que l'épidémie de peste. Comment nos dix protagonistes osent-ils rire alors que là-bas on agonise, mis en quarantaine par les siens? Comment les couples osent-ils se toucher alors que là-bas le moindre contact signe potentiellement votre arrêt de mort? Avec Contes Italiens il est question d'exclusion, de mise à l'écart, de renonciation et de l'impossible compromis entre le coeur (et les appels du corps) et la raison (ceux qui préfèrent abandonner femme et enfants pour ne pas être contaminés, mais qui tuent ainsi une part de leur humanité). Les personnages parlent beaucoup des plaisirs dionysiaques mais point ou en tout cas trop peu d'Eros à l'horizon. Les trois jeunes couples n'ont pas le droit de s'adonner aux plaisirs charnels par simple égard pour celles qui n'ont pas de compagnon. Le film reste très chaste bien que le sujet principal soit l'amour, la puissance de l'amour qui ressuscite, qui réveille les ardeurs jusque-là éteintes, qui révèlent des corps insoumis. Mais comme dans toute grande tragédie, ici le sentiment amoureux va souvent de pair avec la mort. 

Ce cinéma du clair-obscur, trop beau pour être vrai, trop pur pour ressembler à la vie, parle beaucoup d'amour mais c'est un bien mauvais amant. 

Contes italiens de Paolo et Vittorio Taviani - 2015
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